GABON PRESIDENTIELLE 2005 : BONGO POUR UN NOUVEAU SEPTENNAT ?

28 Novembre 2005 , Rédigé par LE MONDE , REUTERS Publié dans #NOUVELLES DU MONDE

  FOCUS SUR L'ACTUALITÉ

 

Au pouvoir au Gabon depuis 1967, Omar Bongo s'offre dans les urnes un nouveau septennat
(Le Monde 28/11/2005)
( 28/11/2005)


Un léger frisson a saisi la communauté française : et si le Gabon devenait une nouvelle Côte d'Ivoire ? Un peu de chahut dans le centre de Libreville, à quelques jours de l'élection présidentielle du dimanche 27 novembre, a suffi à jeter le trouble. Sans doute à tort. Le Gabon n'est pas au bord de la guerre civile, et Omar Bongo Ondimba est en route pour un nouveau septennat.

Vieux routier de la politique, arrivé au pouvoir quand le général de Gaulle — sa référence — était à l'Elysée, le doyen des chefs d'Etat d'Afrique noire a tout pour l'emporter : des moyens matériels presque sans limites ; une formation politique — l'ancien parti unique — qui quadrille le pays ; un mode de scrutin avantageux (un seul tour). Et des opposants désunis. Le plus dangereux a su séduire la jeunesse, mais il manque de moyens. L'autre a de l'argent, mais une image de marque brouillée. Il a été l'un des barons du régime pendant près d'un quart de siècle.

Au dernier jour de ses visites en province, "OBO", comme le désignent ses affiches, est venu porter la bonne parole dans le nord du pays. Il est descendu du ciel en grand équipage : cinq hélicoptères, un avion, des militaires marocains, en civil, pour sa sécurité ; des soldats de la garde républicaine, en uniforme, pour contenir la foule ; des représentants du gouvernement, originaires de la région, par souci électoral ; et des membres de la grande famille Bongo en cadeau.

Il y a le fils, Christian, un jeune banquier, un pistolet dissimulé sous son tee-shirt à l'effigie de son père, Ali, un autre fils, en tenue de sport blanche, solide comme un bûcheron, ministre de la défense tout au long du septennat, qui a laissé à Libreville les Coréens spécialistes d'arts martiaux auxquels il a confié sa protection rapprochée. Et, bien entendu, Edith Lucie, la jeune épouse du chef de l'Etat, veste et jeans joliment décorés, baskets aux pieds et diamants en boucles d'oreilles.

Dans la main de "Maman Edith Lucie" (elle est la fille du président du Congo), un foulard au portrait de son mari, qu'elle agite en l'air dès qu'un haut-parleur vante les mérites de son époux, "le seul candidat qui sait s'occuper des femmes", "le plus illustre fils de l'Afrique", "le candidat de la majorité présidentielle", "OBO l'illustre", "la référence", "l'espérance"... A chacune des cinq étapes de la journée, le scénario se rejoue à l'identique. Tout est réglé comme du papier à musique.

Accueil chaleureux, rapide bain de foule, musique à tue-tête avec esquisse de pas de danse par le couple présidentiel, slogans lancés à la cantonade et enfilade de brefs discours, le plus souvent en français : discours du coordinateur local de la campagne, discours d'un représentant des jeunes, discours d'une déléguée des femmes, discours d'un ou deux dirigeants politiques. Et, clou de la visite, discours du "candidat naturel".

Mince, de petite taille, portant ses éternelles lunettes de soleil, Omar Bongo est alerte. Mais parce qu'il aura 70 ans en décembre, que la campagne a été brève mais bien remplie, il s'économise. Aux habitants de cette zone forestière, il sert donc, à chaque étape, le même propos, faussement improvisé.

Dans ce nord du Gabon couvert d'une forêt somptueuse, il est question de diamants, dont des gisements ont été découverts non loin. "Le colonisateur nous a caché la richesse de notre sous-sol. Il y a du diamant ici. C'est quelque chose de très rare. Chez les Blancs, on peut vous couper le doigt rien que pour avoir cette pierre qu'on appelle le diamant", explique le chef de l'Etat avant de recommander aux jeunes de "faire attention", car les diamants, s'ils procurent des emplois, vont attirer des "étrangers" (le Cameroun et la Guinée- Equatoriale sont tout proches).

Lorsque "OBO" évoque l'élection de dimanche, c'est brièvement pour rappeler qu'il est le garant de "l'unité nationale" et de "la paix". Au passage, "Papa OBO", comme on le surnomme, recommande à la foule d'aller récupérer les cartes d'électeur. L'abstention est visiblement l'unique inquiétude du "candidat président".

Jean-Pierre Tuquoi
Article paru dans l'édition du 27.11.05

© Copyright Le Monde

 

FOCUS SUR L'ACTUALITÉ

 

Omar Bongo semble promis à un nouveau septennat au Gabon
(Reuters 28/11/2005)
( 28/11/2005)


Quelque 560 000 Gabonais étaient appelés aux urnes ce dimanche pour une élection présidentielle à un tour qu'Omar Bongo, doyen des chefs d'Etat africains, semble assuré de remporter.

A la tête de ce petit Etat d'Afrique équatoriale depuis 38 ans, Bongo a pu se présenter pour un nouveau septennat à la faveur d'un amendement constitutionnel adopté en 2003, qui a supprimé toute limite au nombre de mandats présidentiels.
Soutenu par une coalition regroupant plus d'une quarantaine de partis politiques, le chef d'Etat est opposé pour cette élection à quatre autres candidats dont l'un, Zacharie Myboto, a décidé en 2001 de couper les ponts avec le pouvoir en place après 23 années passées au gouvernement.
Les résultats du scrutin devraient être connus mercredi.
Les opérations de vote ont débuté lentement à Libreville, laissant penser que le taux de participation pourrait être faible lors de ce scrutin sans suspense.
"Je ne vais pas voter parce qu'on sait qui va gagner", déclarait ainsi Tony, habitant de la capitale âgé de 23 ans.
Dans plusieurs bureaux de vote de Libreville, un quart seulement des électeurs inscrits avaient voté en début d'après-midi.
Des observateurs étrangers ont déclaré qu'à l'exception de quelques problèmes logistiques ayant retardé l'ouverture de certains bureaux de vote, le scrutin se déroulait convenablement.
Bongo, qui se présente pour la troisième fois depuis le rétablissement du multipartisme en 1990, a mené campagne sur le thème de la paix et de la stabilité.
"PERE DE LA NATION"
"Je vais voter pour Bongo parce qu'il est bon et gentil et c'est le père de notre nation. C'est vrai que nous n'avons pas beaucoup, mais nous vivons en paix et cela est important. Il vaut mieux rester avec ce qu'on connaît et ne pas changer", a déclaré Christian Singa, un électeur de 28 ans.
"Je suis fatigué. On a besoin d'un changement au Gabon. Regardez autour de vous, c'est la misère!", déplorait en revanche Jean-Pierre Nguedzi Mouissi, un père de famille au chômage, interrogé dans la file d'attente d'un bureau de vote.
Omar Bongo, 69 ans, a participé samedi à un dernier rassemblement électoral à Libreville, entouré de son épouse et de son fils, avant une réélection quasi assurée.
Aux milliers de partisans réunis dans le stade "Omar Bongo", le président, vêtu d'un tee-shirt à son effigie, a prévenu que seule sa victoire permettrait de garantir l'unité nationale dans ce pays riche en ressources pétrolières.
Pour ses opposants, Bongo, que certains n'hésitent pas à qualifier de "dictateur", a bâti un système autoritaire reposant sur la corruption et le clientélisme, au détriment d'une lutte efficace contre la pauvreté et le chômage, qui persistent malgré la manne pétrolière.
Les ressources pétrolières représentent au moins 45% du PIB du Gabon et 80% de ses exportations, d'après les statistiques du Fonds monétaire international pour 2004.
Les forces de sécurité, qui ont voté dès vendredi afin d'être disponibles le cas échéant, patrouillaient dimanche dans les rues de la capitale.
Outre Myboto, les autres candidats de l'opposition sont Pierre Mamboundou, qui a fait campagne sous le slogan "Quarante ans, ça suffit !", Augustin Moussavou King, du Parti socialiste gabonais (RSD), et Christian Maroga, du Rassemblement des démocrates (RDD).

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